Durant la fin de l’été et l’automne 2021, nous avons sillonné les Alpes du Nord au Sud avec notre camping-car. En l’espace d’environ trois mois, nous avons exploré des vallées de la Savoie et Haute-Savoie, les Hautes-Alpes, les Alpes de Haute-Provence et les Alpes Maritimes. Cette chaîne de montagnes est si vaste et riche en espaces naturels qu’il faudrait plus d’une vie pour tout découvrir. Malgré tout, nous avons arpenté pas mal de sentiers et sommes déterminés à revenir explorer les Alpes. Nous avons été conquis par la grandeur de ses sommets, la beauté des vallées et la richesse de la biodiversité. Pour ce nouveau topo, on vous emmène dans un de nos départements coup de cœur de la région : les Hautes-Alpes. Plus précisément, nous allons vous raconter une belle randonnée dans le mythique Parc National des Écrins, à la découverte du Glacier Noir.
Le Glacier Noir dans le massif des Écrins
Pour accéder au départ de la randonnée du Glacier Noir, vous devez vous rendre au Pré de Mme Carle. Cet espace situé dans la partie Est du Parc National des Écrins est une prairie au pied des grands sommets de la chaîne. Pour vous y arriver, vous devez emprunter la Nationale 94 entre Briançon et Embrun, puis vous diriger vers la vallée de Vallouise par la Départementale 994. Le pré de Mme Carle se situe tout au bout de la route. À partir des premières neiges et jusqu’à la fonte, la route ferme au niveau du lieu dit Ailefroide, 4,8km plus bas. Il faudra donc comme nous l’avons fait, vous garer à cet endroit et accéder au pré à pied.
Le nom de Glacier Noir vient de la couche de moraine épaisse de 20 à 30cm qui le recouvre. Ces graviers et pierres protègent la glace du soleil. Esthétiquement donc, s’il n’est pas recouvert de neige, le glacier est complètement gris foncé. C’est plutôt austère comme ambiance, mais assez impressionnant. Lorsque nous nous y sommes rendus début novembre 2021, les premières neiges étaient tombées et nous n’avons pas pu assister à ce spectacle. Nous avions à la place une grande coulée blanche descendant des sommets imposants.
Itinéraire de la randonnée du Glacier Noir
Voici les statistiques ainsi que la carte de l’itinéraire que nous avions prévu pour le Glacier Noir. À cause de la neige, nous avons dû nous garer 5km avant et 350m de dénivelé plus bas. Si vous vous y rendez en période hivernale, vous devrez en faire de même et au lieu d’une petite balade vous partirez donc pour une bonne partie de la journée.
Le glacier noir en été depuis le Pré de Mme Carle :
Distance | 7 km | Altitude min | 1850m |
Dénivelé positif | 600m | Altitude max | 2450m |
Dénivelé négatif | 600m | Temps de marche (A/R) | 2h30 |
Le glacier noir en hiver depuis Ailefroide :
Distance | 17 km | Altitude min | 1500m |
Dénivelé positif | 950m | Altitude max | 2450m |
Dénivelé négatif | 950m | Temps de marche (A/R) | 6h00 |
Carte de l’itinéraire de randonnée au glacier noir
Particularité de la randonnée au glacier noir
Il y a plusieurs raisons qui nous ont poussés à choisir cette randonnée plutôt qu’une autre dans le massif des Écrins. D’une part, la neige venait de tomber fortement en altitude, et les routes d’altitude fermaient. Il a donc fallu choisir un itinéraire encore accessible à cette période. Étant donné ces nouvelles conditions hivernales, nous avons opté pour une marche pas trop longue ni trop exigeante sur le papier. Nous n’avions d’ailleurs à ce moment-là pas nos raquettes avec nous, seulement nos crampons et piolets. N’étant pas assez bien équipés pour bivouaquer en hiver, nous devions choisir une course faisable sur une courte journée (ensoleillement hivernal de courte durée).
Outre ces aspects plutôt pragmatiques, la randonnée au Glacier Noir nous semblait intéressante par sa particularité morphologique. Une grande partie de la marche s’effectue sur une fine crête escarpée longeant le glacier. Ne pouvant pas accéder aux sommets, cela nous permettrait tout de même d’avoir quelques sensations qu’on aime en montagne. On vous raconte tout cela plus en détail.
Départ d’ailefroide
Pour optimiser le temps de jour, nous sommes venus nous garer la veille au départ de la randonnée. La nuit que nous passerons dans le camping-car est certainement l’une des plus froides que nous ayons eu pour le moment, avec -13 degrés à l’extérieur et -3 dans le véhicule au réveil…
Il faut dire que notre vieux Jolly n’est pas du tout isolé et a des déperditions thermiques terribles. Heureusement nous avons tout de même le chauffage. Mais nous ne le laissons jamais allumé lorsque nous dormons, question de sécurité. Nous sortons donc les duvets de bivouac lorsque de telles températures sont annoncées.
Préparation à la fraîche
07h00, le réveil sonne. Premier réflexe, nous allumons le chauffage. Le soleil n’est pas encore levé et de toute façon nous ne verrons quasiment pas ses rayons de la journée tellement la vallée est encaissée. On avale un bon petit déjeuner et on boucle nos sacs. On emporte un thermos de café pour nous réchauffer, ainsi qu’un plat à cuire au réchaud. L’hiver, c’est tout de même plus agréable qu’un sandwich. On emporte les crampons au cas où la neige serait glacée, et selon la couche présente, nous verrons si nous pouvons effectuer la randonnée en entier. En route pour le glacier noir.
Première partie de la montée
Pour arriver au Pré de Mme Carle, nous avons deux options : prendre la route ou bien un sentier pédestre de l’autre côté du ruisseau. N’étant pas fanas de randonnée sur le bitume, nous choisissons le chemin. Les premiers hectomètres se font facilement, il y a très peu de neige et c’est quasiment plat. Le mélange des couleurs automnales et des premières neiges est superbe. Le décor est très bucolique et nous avons la chance d’apercevoir plusieurs chamois non loin du chemin à plusieurs reprises. Nous entrons dans le parc national des Écrins.
Après environ trois quarts d’heure de marche, notre rythme commence à ralentir. Petit à petit, la neige s’accumule, la couche s’épaissit, et il n’y a plus de trace. Le chemin est alors compliqué à trouver, il faut sans cesse regarder la carte. Parfois, des pas de renards ou de chamois nous guident, ils connaissent la route par cœur, été comme hiver ! Ils arrivent surtout mieux à se déplacer que nous dans la neige. Nous aurions peut-être dû monter par la route, c’est ce qu’on vous recommande si vous entreprenez cette randonnée au glacier noir en hiver.
Le pré de Mme Carle
Alors que nous avançons dans la neige, slalomant entre les branches des buissons pliées sous le poids des flocons amassés, nous finissons par retrouver la route. Nous voilà sur un large plateau traversé par un torrent, de hauts sommets se dressent devant nous et on aperçoit de loin le Glacier Blanc.
Légende du pré de Mme Carle
On ne sait pas vous, mais on adore les vieilles histoires de montagne. Lorsque nous avons séjourné aux portes des Écrins, un ami du coin nous a compté le récit insolite qui a donné le nom à ce lieu. Il faut remonter au XVIe siècle auprès du Seigneur de Vallouise Geoffrey Carle. L’homme souhaita décorer son château d’une peinture représentant sa femme. Un peu volage, cette dernière s’éprit pour l’artiste, mais aussi pour un seigneur voisin ! Offensé, le peintre l’illustra sur un bouc, symbole de la luxure. Le Seigneur comprit l’allégorie et décida de se venger. Il assoiffa une mule durant plusieurs jours, puis la fit partir en direction d’Ailefroide avec Mme Carle attachée à son dos. La bête ne s’arrêta pour boire que lorsqu’elle trouva de l’eau, au fond de la vallée. La seigneuresse serait ainsi morte noyée dans la rivière.
Le pré de nos jours
Le Pré de Mme Carle est plus connu aujourd’hui pour être le point de départ de superbes randonnées dans le Parc National des Écrins. C’est notamment d’ici qu’il faut démarrer pour accéder au refuge du Glacier Blanc et à celui des Écrins. Il est de ce fait très fréquenté en période estivale.
Des panneaux indiquent la direction des deux glaciers à proximité, le Glacier Blanc et le Glacier Noir. On y trouve un chalet refuge ainsi qu’un centre d’accueil du parc. Hors saison, tout était fermé, mais les chalets en bois sous la couche de neige recouverte d’aiguilles dorées étaient d’un charme fou. Les mélèzes sont flamboyants, mais commencent à perdre leurs aiguilles, on est entre deux saisons. Le décor blanc et orangé est splendide. Nous traversons la prairie enneigée puis commençons à monter en zigzag.
Le long du glacier noir
Nous gagnons en altitude et profitons de la vue sur la vallée. Une petite pause café s’impose. Nous préparons toujours une boisson chaude pour nos randonnées hivernales, cela permet de ne pas trop se refroidir lors d’une pause. Une petite barre céréales et un peu de caféine nous boostent pour la suite de la marche. Nous reprenons la montée et tombons rapidement sur une bifurcation. Depuis la route, nous suivions des traces de pas dans la neige, mais elles poursuivent en direction du glacier blanc. À partir d’ici nous allons devoir faire notre trace. Nous continuons en direction du Glacier Noir, et avançons dans l’épaisse couche blanche immaculée.
La crête du glacier noir
Le chemin, enfin ce qu’on en devine, devient de plus en plus étroit et de chaque côté le dévers s’accentue. Nous marchons sur une crête morainique naturelle qui longe la coulée du glacier noir. Il faut être prudent, encore plus avec des conditions hivernales, pour ne pas tomber d’un côté ou de l’autre. Au bout d’un moment, des panneaux indiquent le danger potentiel de ce parcours, à éviter si l’on souffre trop du vertige. Nous apprécions ces passages un peu vertigineux et nous n’avons pas trouvé cela trop impressionnant. Juste ce qu’il faut pour avoir quelques sensations, mais ne pas se sentir mal. Cela dépendra évidemment de chacun, mais en période estivale il semble que le chemin soit tout de même assez large et sécurisant. À cause de toute la neige présente, nous redoublons de prudence. Avec le dénivelé en prime, nous commençons à fatiguer.
Balme de françois Blanc
L’objectif du jour n’est plus très loin, le chemin termine en impasse au Balme de François Blanc et devrait offrir une très belle vue sur les cimes des Écrins. Seulement, nous avons de plus en plus de mal à avancer, la neige nous arrive aux genoux, et le temps défile. Il est 14h passé, le soleil est déjà bien caché derrière les montagnes, le vent souffle de plus en plus fort et la température descend. Alors qu’il ne reste qu’un peu plus d’un kilomètre, nous décidons de faire demi-tour. La frustration est présente, mais nous pensons d’abord à notre sécurité. Avec la fatigue et les -10 ou -15 degrés, nous n’avons pas chaud, même en marchant. Il vaut mieux rentrer avant que la nuit tombe, le chemin du retour est encore long.
Bilan de la randonnée au glacier noir
En redescendant, nous sous sommes arrêtés manger un morceau au niveau du Pré de Mme Carle. Nous reprenons un peu d’énergie et rentrons au camping-car par la route pour aller plus vite. Il y a du verglas à de nombreux endroits et il faut donc rester vigilant jusqu’au bout. Évidemment nous sommes un peu déçus de ne pas avoir accédé au panorama promis au bout du chemin. Mais c’est sans regret puisque nous savons qu’il vaut mieux prévenir que guérir comme on dit.
C’était une belle randonnée, mais nous n’avons pas eu les conditions optimales pour en profiter. Elle serait sûrement plus appréciable au printemps ou au début de l’automne lorsque la neige ne s’est pas encore installée. Il y a d’ailleurs un tas d’itinéraires dans le Parc National des Écrins que nous aimerions sillonner, mais on ne peut pas être partout au même moment !
Comme tous les glaciers des Alpes, le glacier noir et le glacier blanc sont en net recul. Un constat effrayant qui témoigne des changements climatiques en cours.
L’arrivée de l’hiver a ainsi marqué notre départ de la France vers l’Italie. Si nous pensions aller chercher de la chaleur vers le sud, nous n’avons finalement pas pu résister à l’envie d’aller découvrir les Dolomites. Pour retrouver d’autres topos, n’hésitez pas à faire un tour dans notre section dédiée à la randonnée dans les Alpes.
On vous recommande particulièrement :
- Le lac de Peyre
- La haute vallée de l’Ubaye
- Le refuge de Presset
- 3 jours dans le Mercantour
- Une nuit au sommet du Mont Thabor (3178m)
- Le Queyras
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À très bientôt !
Ben & Ania sont deux aventuriers amoureux de la nature et passionnés par ce vaste monde qui nous entoure. Quand ils ne sont pas sur les sentiers de randonnées, par monts et par vaux, ils créent du contenu pour les entreprises qui font appel à leurs talents. En travaillant à distance, ils peuvent se permettre de voyager en continu. Pour ça, ils ont choisi Jolly-Jumper, un camping-car Hymer B534 de 1990. Découvrez leurs univers faits de sommets enneigés, de treks loin de la 4G et de feux de camps bien arrosés. Pour ne rien louper, suivez leurs aventures sur ce blog ou via leurs réseaux sociaux !